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La subjectivité des mots

Les mots ne sont pas neutres. On le sait. Ils sont aussi éminemment identitaires. Derrière chaque mot, il y a une histoire individuelle, une expérience, un ressenti. Cette subjectivité n’est pas sans effet. Elle implique qu’un mot formulé par quelqu’un puisse être compris d’une manière différente par quelqu’un d’autre. Une notion fondamentale en matière de communication.

Ce qu’il y a de bien avec les mots, c’est qu’ils sont capables de s’adapter à toutes les situations. On leur fait dire à peu près n’importe quoi aux mots. N’importe quoi, mais pas à destination de n’importe qui. Car les mots sont aussi éminemment subjectifs, pour ne pas dire intimes. Le mot porte d’abord la langue. Chaque idiome à ses propres structures, sa propre grammaire et forge intimement notre manière d’exprimer notre pensée. Ainsi, le vocabulaire Inuit aurait vingt façons de qualifier la neige alors que celui des Touareg en aurait quatre pour nommer le désert. Un foisonnement aujourd’hui menacé par la généralisation de la langue anglaise dans le domaine de l’entreprise mais aussi des publications scientifiques, tendant à uniformiser les pistes de recherche et à favoriser les chercheurs de langue anglaise, empêchant certaines grandes idées d’émerger.

Un mot, des significations

En d’autres termes, les mots sont équivoques. Ils présentent autant de biais de compréhension qu’il y a de langage. « Traduttore traditore » selon la fameuse locution italienne. Ils ne sont pas reçus de la même manière selon que l’on parle Mandarin, Swahili ou Français. Chacun investit les mots selon son propre langage, bien sûr, mais aussi sa propre culture, sa propre expérience ou son environnement. Pour un même signifiant, il existe donc sans doute autant de signifiés que d’expériences individuelles. Et il n’y a qu’à constater la difficulté pour faire valider un texte par de multiples relecteurs pour s’en convaincre.

Les mots qui rassemblent, les mots qui excluent

Cette subjectivité du mot n’est pas anodine. Elle est un puissant marqueur identitaire. Le mot est à la fois ce qui réunit et ce qui exclut. Ne pas parler la même langue, c’est ne pas appartenir au même groupe. Et je ne parle pas ici forcément des seules barrières de la langue, mais aussi du jargon et des éléments de langage dont abusent nombre de métiers et sont souvent autant de signes cherchant à protéger un pré-carré plutôt qu’à clarifier une pensée. Slang, argot ou louchébem sont autant d’usages jouant sur les mots qui ont pour fonction sociale de marquer un territoire privé. Le mot est d’ailleurs un marqueur social évident, tant il est lié à l’éloquence, à la rhétorique et à la maîtrise du langage.  

L’importance du langage commun

Appliqué aux métiers de la communication, ces marqueurs sont importants à plusieurs titres. Ils montrent d’abord à quel point il est important de savoir se défaire de ses propres jargons et usages si on veut espérer être compris par un public qui n’est pas toujours expert. Il faut savoir quitter le réflexe dogmatique qui consiste à confondre expertise et technicité. Ils montrent aussi, ce qui constitue la continuité de la démarche, qu’il est important de savoir adapter son vocabulaire à son audience. C’est la base de la rhétorique et celle de toute stratégie de contenu fondée sur le principe des personas et les techniques d’UX writing. Des méthodes qui cherchent à comprendre a priori les usages de son audience pour lui proposer des contenus qui lui parlent. Un principe qui n’a rien de nouveau puisque la rhétorique d’Aristote s’appuyait déjà sur la connaissance préalable de son auditoire pour permettre d’adapter le ton et le style de son discours et porter avec force ses arguments. Si le mot est subjectif, sa plasticité doit donc permettre de l’adapter autant que possible pour coller à son public. 

Le mot, c’est une personnalité

Cette subjectivité des mots implique également une forte propension à porter une personnalité. Un style, devrait-on dire pour rester dans le domaine linguistique. « Donnez-moi six lignes de l’écriture d’un homme et je me charge de le faire pendre » écrivait Richelieu, histoire de signifier que quelques mots en disent souvent plus sur un individu que le personnage lui-même. Quiconque à un jour eu à travailler sur la création d’un nom de marque sait à quel point le mot, même pure création, est porteur à lui seul, par ses phonèmes et ses références, d’un sens et d’un imaginaire symbolique. Définir un champ sémantique c’est une histoire de singularité. Une marque, au même titre qu’un individu, se définit aussi par les mots qu’elle utilise. Cette singularité est évidemment un fondamental en marketing. C’est aussi une question de visibilité sur le net. Définir un champ sémantique, c’est décider des mots-clés avec lesquels vous souhaitez que votre audience vous trouve. Sans analyse de ce territoire, difficile de bâtir une quelconque stratégie de référencement. Et inutile de rappeler à quel point le référencement est une clé de la performance dans la masse d’information du Net.

Le mot, élément culturel de la marque

Cette personnalité lexicale donne désormais souvent lieu à une charte éditoriale, qui permet à quiconque est en charge de la production de contenus de connaître les fondamentaux de la personnalité de la marque pour laquelle il travaille et de respecter son langage. Elle est une clé de voûte de la qualité et de la cohérence. Attention toutefois, car la singularité d’une marque ou d’une entreprise ne saurait se résumer à la subjectivité de ses contenus. La marque est un « agent culturel » selon les termes de Daniel Bô. Elle est la résultante d’une manière d’être, de faire et d’interagir avec ses environnements. Son univers sémantique fait partie intégrante de cette culture et se doit d’entrer en cohérence avec le reste de ses attributs. Autrement, gare à la schizophrénie et la perte de repère pour votre public. 

Pascal Beria

 

Crédit photo : Antenna

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